Contexte
(exploration et exploitation)
La
présentation de cette activité cible l’exploration des conditions réussies
d’utilisation du numérique dans l’enseignement supérieur. Le scénario de cette activité
renvoie, d’une part au concept d’innovation, et d’autre part aux conditions
d’utilisation favorables du numérique, sous le titre « Exploiter le
numérique en enseignement supérieur ». Entre l’exploration de conditions
optimales pour son utilisation dans l’enseignement supérieur et son
exploitation, nous souhaitons faire une distinction. La limite du passage entre
cette exploration raisonnée et son exploitation (qui n’est pas sans comporter
son lot de risques, d’éventuels excès ou abus, ainsi que des dérives potentielles)
constituera un enjeu éthique pédagogique de ce billet.
Billet :
L’innovation
pédagogique que j’ai identifiée est l’APP en sexologie à l’UQAM pour la
formation des futur.e.s sexologues ou des futur.e.s professeur.e.s ayant à
dispenser un cours en éducation à la sexualité. Parmi les caractéristiques qui
font de cette découverte du manque d’APP en sexologie à l’UQAM (un manque
validé par des pairs chargé.e.s de cours et professeur.e.s en sexologie), on
peut notamment compter la correspondance entre les situations potentielles
rencontrées par les futur.e.s sexologues et les éléments choisis de façon libre
et combinée par l’ensegnant.e en sexologie qui leur soumet un cas limite. Malgré
les difficultés inhérentes à l’enseignement de cette matière, la mise en
situation (notamment par l’APP) des sexologues en formation place d’emblée l’enseignant.e
dans des conditions optimales/contrôlées d’enseignement, puisque c’est lui/elle
qui en établit le scénario, le contenu, etc. Ces caractéristiques sont
explorées dès l’école secondaire par l’enseignement en ligne de l’éducation à
la sexualité; un enseignement qui place aussi les étudiant.e.s en meilleure situation
d’égalité (puisque, par l’APP, tou.te.s ont un accès aux mêmes données de
départ, sachant que tou.te.s n’ont pas bénéficié de la même ouverture
familiale/scolaire face à la sexualité et n’ont pas les mêmes connaissances en
la matière).
Pour
expliciter les avantages et inconvénients de l’innovation qu’est l’APP en
sexologie, nous proposons de partir d’une pratique enseignante numérique
d’éducation à la sexualité qui a reçu un
prix de l’innovation comme projet éducatif secondaire de la Fédération des
établissements d’enseignement privés du Québec. Cette innovation pédagogique offrant
aux élèves un contexte d’apprentissage innovant et stimulant pour la FFEQ, il
s’agirait de le proposer comme méthode d’apprentissage actif aux enseignant.e.s
uqamien.ne.s qui sont chargé.e.s de la formation sexologique en éducation à la
sexualité. Nous avons déjà approché ces personnels enseignants pour voir leurs
réactions et présenter les avantages et inconvénients à travers plusieurs
points de vue extérieurs à notre projet. Comprendre la réception de ce projet
ne peut se faire sans dire quelques mots de son historique.
Pour
comprendre l’histoire de ce projet d’innovation pédagogique, il faut partir du
projet d’apprentissage en éducation à la sexualité (AÉS, tomes 1 et 2) qui est
mené au Collègue Bourget :
La
découverte de cette innovation pédagogique nécessaire à l’enseignement en
sexologie[1]
à l’UQAM origine notamment d’échanges avec une sexologue, Jolaine Lessard, qui
a été formée à l’UQAM par des méthodes classiques d’apprentissage et qui
utilise désormais au Collège Bourget les pédagogies actives telles que l’APP
pour son enseignement en ligne sur la sexualité.
Nos
échanges suivent ceux, collectifs, d’un colloque panquébécois[2]
que j’ai organisé pour des professionnel.le.s en éducation et en pédagogie de
la sexualité (en éducation antisexiste). Dès la création de mon profil dans le
Forum de partage, j’avais présenté le programme de ce colloque (du congrès 2017
de l’Acfas à l’Université McGill) :
Il
faut savoir que le programme d’AÉS offre quarante cours d’éducation sexuelle
qui sont regroupés en six thèmes, dont l’image corporelle, l’identité de genre
et rôles sexuels, la vie affective et amoureuse, l’agir sexuel, la violence
sexuelle, la prévention des ITSS et des grossesses. Le programme s’adresse
autant aux élèves du premier cycle qu’aux élèves du deuxième cycle du
secondaire. L’adaptation thématique aux phases de développement psychosexuel
des adolescent.e.s apparaît comme un premier avantage de cette méthode
d’apprentissage sur la sexualité.
Les
avantages pointés par la communauté de chercheur.e.s et de professionnel.le.s
de l’intervention présent.e.s lors de la présentation de ce projet pilote étaient
notamment qu’il s’agit d’un livre interactif (avec des questions interactives),
dont les outils (textes, images, liens, etc.) sont complétés par de nombreuses
sources de contenu du programme. Le côté récapitulatif et visuel complétant ce
programme, l’accessibilité et l’universalité du contenu par tablette
électronique (tablette dont sont équipées l’ensemble des jeunes de ce Collège),
le confort de l’anonymat et le respect de l’intimité des jeunes, font du livre
numérique d’AÉS un outil pédagogique répondant tant aux besoins des élèves qu’à
la volonté des parents de suivre l’éducation, particulièrement en la matière.
D’autres ont enfin souligné l’importance de l’outillage du calendrier de
l’enseignant.e (pour vérifier au préalable si la lecture proposée est
appropriée) et la possibilité pour les jeunes de pouvoir communiquer
anonymement avec un.e spécialiste pouvant répondre à leurs questions via Étude
secours.
Cet
outil pédagogique, ses usages potentiels par des sexologues apprenant.e.s à l’UQAM,
comptent peu d’inconvénients selon les spécialistes en présence durant ce
colloque. Ont été mis de l’avant durant ledit colloque l’importance de tenir
compte de l’appartenance culturelle par-delà l’âge de l’élève, celle de la
formation continue des enseignant.e.s qui sont en charge de l’éducation
sexuelle au secondaire, la pratique d’un apprentissage plus pratique et
contemporain comme l’APP chez les étudiant.e.s en sexologie qui visent soit
l’enseignement sur la sexualité soit l’intervention sexologique auprès de
jeunes avec des problématiques sexo-corporelles.
Ce
dernier inconvénient éventuel avait été discuté relativement à la
cyber-intimidation et le harcèlement lié au genre ou à la sexualité pouvant
mener à des idéations suicidaires ou au suicide (Hinduja et Patchin, 2009). Ce
lien et ce risque avaient amené à considérer cet enjeu du choix de
l’intervention enseignante en fonction d’antécédents comportementaux des élèves
(Roy et Beaumont, 2015) et notamment de possibles signes d’automutilation
corporelle, d’anorexie ou de boulimie, ou encore de bigorexie. Cela dit, en
choisissant la nature des interventions selon le passé des élèves et en jouant
davantage un rôle éducatif, les enseignant.e.s contribuent cela dit à leur
coopération et à leur ouverture. Cette culture de l’innovation numérique en
éducation à la sexualité au secondaire, malgré le caractère exploratoire du
projet pilote d’AÉS au Collège Bourget constitue sans conteste une voie d’accès
privilégié à des conditions réussies d’utilisation du numérique au baccalauréat
en sexologie, à l’UQAM, mais pas seulement. Le chapitre de livre des
enseignantes qui sont à la conception pédagogique de ce programme secondaire
(Lessard et Riley, 2019) portera aussi un éclairage au sujet du lien entre ces
deux enseignements (les jeunes au secondaire en apprentissage sur la sexualité
d’un part; les étudiant.e.s comme futur.e.s enseignant.e.s ou
intervenant.e.s/professionnel.le.s d’autre part). Des développements
pédagogiques qui constituent d’autant plus une innovation qu’ils sont implantés
et discutés scientifiquement (colloque et Actes à paraître).
Bibliographie :
Association
canadienne de santé publique (2004). Trousse d'évaluation de l'intimidation, du
harcèlement et des relations entre enfants du même âge en milieu scolaire.
Récupéré de https://www.cpha.ca/sites/default/files/uploads/resources/antibullying/assessment_toolkit_f.pdf
Hinduha et Patchin (2010). Bullying, cyberbullying,
and suicide. 14 (3), 206-211. Archives of
Suicide Research. Récupéré de https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20658375
Lessard J. et Riley K. (2019).
Le cours d'éducation à la sexualité au secondaire, en ligne. Dans David Risse
(dir.). Apprentissages antisexiste et antiraciste: pédagogies actives et
collaboratives. Québec: Presses de l'Université Laval.
Roy et
Beaumont (2013). L'intervention en contexte de cyberintimidation: les pratiques
des enseignants. Enfance en difficulté, 2, 85-109. Récupéré de https://www.violence-ecole.ulaval.ca/document/?no_document=2405
[1]
Cela d’autant plus que
l’éducation sexuelle reste en partie optionnelle au secondaire (dépendant
encore de l’ouverture de la direction des établissements scolaires) et qu’à
l’UQAM il appert, selon Jolaine Lessard et d’autres sexologues diplômé.e.s
consulté.e.s récemment, qu’on enseigne toujours moins comment enseigner
l’éducation à la sexualité que les théories sur la sexualité, sur sa nature, son
histoire, sur son fonctionnement, etc.
[2] Colloque dont les Actes sont à paraître et permettront
de montrer l’importance de l’innovation pédagogique que représente l’APP en
sexologie, ainsi que celle de l’utilisation combinée des environnements
numériques d’apprentissages selon les âges au secondaire, selon le rythme
d’apprentissage de chaque élève et selon les phases du développement
psychosexuel des adolescent.e.s. Cela pour une éducation à la sexualité adaptée
aux différents stades/élèves du secondaire. L’APP en sexologie peut également
contribuer à certaines lacunes dans la formation à l’enseignement de
l’éducation à la sexualité.